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NOURRIR LE COLLECTIF

Marie-Pier Vézina


ABRI COLLECTIF + NOURRIR LE COLLECTIF

Favoriser l’autonomie alimentaire et culturelle d’une communauté de Rigaudiens

 

 

Être utopiste, en 2021, c’est de croire en une croissance infinie dans un monde fini. La notion de « vouloir toujours plus », il faut s’en détacher rapidement et collectivement, car la course aux profits et la soif infinie de biens individuels placent l’humain au cœur d’une crise sociale et environnementale sans précédent. 

L’omniprésence du capitalisme à l’échelle planétaire fragilise l’être humain puisque les ressources sont distribuées de manières inéquitables, ce qui ne permet pas d’assouvir les besoins de chacun. Ainsi, du territoire mondial à Rigaud, les enjeux d’insécurité alimentaire et résidentielle, combinés avec une population isolée et fragmentée, contribuent à sa vulnérabilité. Pour transposer ces problématiques en opportunités, le projet s’inscrit dans une proposition d’ensemble, un petit village, qui tend à augmenter l’offre de logements abordables et autonomiser une parcelle du territoire de Rigaud sur le plan alimentaire et culturel. 


 

Une autonomisation collective

Le développement conceptuel et formel du projet s’ancre dans les principes de la décroissance dans le but de favoriser l’habitabilité à long terme du lieu proposé, ou même, de la surface terrestre. Cette proposition vise une réduction volontaire et équitable de la production matérielle et énergétique globale qui se veut excessive et non-durable. Pour permettre aux individus de se prémunir contre leur dépendance à la croissance mondiale, les communs représentent la solution au cœur de l’élaboration programmatique du projet. 

 

En réponse au dédoublement des biens et pour répondre à un plus grand nombre de besoins, les espaces utilitaires, créatifs et de production alimentaire et énergétique sont mutualisés. La fragmentation de ces usages sur l’entièreté du site convoité vient générer un petit village, permettant aux fonctions publiques une vitrine sur l’extérieur et la communauté. Les communs seront différenciés architecturalement grâce à leur matérialité et couleur en contraste avec les unités d’habitation. Ainsi, ils deviennent des points de repère pour la communauté et promeuvent une économie de partage sur la place publique.
 

La culture Rigaudienne au cœur du village

 

Le projet vise la renaissance de ce qui est important pour l’humain ; se divertir et s’alimenter convenablement. Pour ce faire, on se doit de retrouver des artisans agricoles et des artisans culturels au sein de la communauté. Avant ce projet, ces acteurs ne s’y trouvait pas. Nourrir le collectif vient remettre en avant-scène ces artisans dans le but de redonner la richesse qui appartient à Rigaud. Le petit village se veut alors comme un endroit de rassemblement pour la population et les artisans, dans le but d’inciter la rencontre, le soutien local et le partage de connaissance par l’entremise d’ateliers et de boutiques. Un lieu qui se dynamise différemment au fil de la journée afin de créer un lieu vivant en tout temps.

 

Le projet se déploie sur son site comme un petit village. Au total, 7 pavillons entrelacés de végétation et de terrasses invitent les gens à déambuler dans le but de découvrir les différents ateliers et boutiques offerts selon les saisons. Les ouvertures intérieures et extérieures sont travaillées de manière à offrir une nouvelle expérience aux usagers. En plus d’échanger, de participer et d’acheter des produits, les sens des visiteurs s’éveilleront ; voir, entendre, sentir, toucher et goûter. Chacun de ses sens sera appelé à différents moments afin de proposer une découverte dynamique à tous.

 

Une architecture inclusive

En réponse à la fragmentation des ménages, additionné avec le vieillissement de la population et la hausse des familles vivant sous le seuil de la pauvreté dans le centre-ville de Rigaud, le projet d’architecture vise à bonifier l’offre de logements abordables en densifiant un secteur résidentiel à proximité de son centre. Pour assurer la durabilité de l’habitat collectif, l’évolution des modes de vie et l’hétérogénéité de ses usagers ont été considérés dans la mise en place d’espaces de qualité adaptables et réversibles. 

 

Formellement, le projet s’articule sur 3 niveaux et s’implante sur un site végétalisé d’environ 10 000m2. Le premier niveau met en avant plan les espaces mutualisés intérieurs et extérieurs et l’ensemble sera surmonté de 50 unités minimales et modulaires pour mettre les résidents à l’abri de la surconsommation et des pressions du marché immobilier. L’accès aux logements se traduit par un système de coursives de manière à assurer une transition plus fluide de l’espace collectif à l’espace intime. De plus, ce lieu déambulatoire agira comme marqueur d’individualité en offrant un espace couvert aménageable à chaque résident. Orienté vers le sud et entouré d’ouvrants vitrés, cetespace élancé devient une galerie végétalisée où les rencontres informelles prennent vie.

Un aménagement régénératif

L’Abri collectif est conçu pour être en symbiose avec son environnement. Son implantation tend à respecter les écosystèmes naturels en place et revitaliser le site en intégrant la permaculture dans la conception de son aménagement. Les éléments programmatiques qui assurent une production circulaire alimentaire et énergétique annuelle, tels que les jardins, les serres aquaponiques, le stockage des eaux et des matières résiduelles, s’articulent autour des espaces communs pour rapprocher les usagers de leur consommation. 

 

Les serres agissent comme espaces d’entre-deux entre l’Abri collectif et Nourrir le collectif. Ces serres côtoient alors les logements, les boutiques et les ateliers d’arts. À certains moments, ce sont ces fonctions qui sont à même la serre et non l’inverse. Afin de préserver la végétation existante du sol et d’offrir une meilleure perméabilité, les différents pavillons se connectent par des passerelles légèrement surélevées. La nature peut donc agir librement en-dessous des pieds des visiteurs, comme un quai.

 

Nourrir le collectif s’inspire aussi de la nature pour concevoir. Au travers des saisons, cette nature vient animer les parois extérieures des pavillons ; elles s’ouvrent et se referment selon le temps de l’année. En été, le projet se retrouve majoritairement à l’extérieur et les entrées se multiplient. En hiver, le lieu se referme, mais les kiosques et activités hivernales habitent et dynamisent le site. L’architecture du lieu est vivante.

 

En résumé, l’Abri collectif et Nourrir le collectif tendent à offrir bien plus qu’un toit pour ses usagers, mais bien l’opportunité d’agir localement et collectivement sur son environnement, afin de trouver des alternatives et continuer de s’épanouir devant un monde crise. En effet, le projet d’architecture vise une autonomisation du territoire en favorisant la sécurité alimentaire, financière, culturelle et environnementale de ses habitants grâce à des espaces mutualisés. 

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